Une feuille de route pour la création de la monnaie ECO CEDEAO
La Déclaration de Lomé (28 mai 2021)
Une feuille de route pour la création de la monnaie Éco-Cedeao
A. Finalités majeures du projet de la réforme
1. Depuis la décision du Sommet des Chefs d’État de la Cedeao du 20 juin 2019 à
Abuja, le principe de la monnaie Éco-Cedeao est acquis. Le processus politique
vers l’adoption d’une monnaie commune répond à une revendication légitime en
faveur de l’établissement de la pleine souveraineté monétaire des 15 États
membres.
2. Le projet s’inscrit dans la perspective post-Covid de reconquête de toutes les
souverainetés fondamentales (alimentaires, sanitaires, commerciales,
financières, politique, sécuritaires) à l’échelle de la région.
3. Le projet prend acte de la décision de sortie de la Zone franc engagée depuis fin
2019 par 8 États avec notamment le rapatriement des devises du compte
d’opérations domicilié en France et avec le choix d’une nouvelle dénomination
de la monnaie, l’Eco.
4. Le projet vise à associer l’ensemble des États, quelles que soient leurs différences,
en garantissant la souplesse nécessaire pour absorber les impacts des chocs
externes lesquels peuvent diverger.
5. Enfin le projet vise à maximiser les potentialités d’une intégration économique
accrue et renforcée.
B. Sur les choix fondamentaux
6. Le projet prend en considération les critères d’une bonne politique de change, à
savoir financer les importations essentielles, soutenir les exportations,
promouvoir le crédit local, protéger les « secteurs naissants » à fort potentiel
d’emplois, compenser les impacts péjoratifs des chocs externes.
7. Sur les critères de convergence à court terme (prix, dette, déficit), le projet
reconnaît la nécessité de fixer des critères macroéconomiques minimaux (ticket
d’entrée) pour l’adhésion mais surtout le projet considère que la résorption des
différentiels (prix, dette, déficit) n’est pas un prérequis, mais un objectif de
moyen terme, rendu plus aisé à obtenir avec une politique économique
adéquate.
8. Un desserrement de la contrainte d’inflation (4-8 %) est requis afin de ne pas
brider le potentiel de transformation structurelle. Une inflation modérée stimule
le crédit car elle allège la dette pour les emprunteurs. Elle récompense
l’innovation.
9. Ce faisant, la convergence structurelle est fondamentale et des politiques
sectorielles en faveur des chaînes de valeur agricoles et industrielles à vocation
régionale doivent être mises en œuvre de manière complémentaire.
C. Sur le futur système
10. Le nouveau système sera construit sur une nouvelle monnaie, sui generis,
distincte des monnaies existantes dans la Zone CEDEAO.
11. Une Banque centrale serait chargée de conduire la politique monétaire et de
change des pays membres de la Zone Éco-Cedeao.
12. La mutualisation des réserves de change sera le socle de la solidarité.
13. Dans la période de transition, la solidarité sera confortée sur une base politique
et institutionnelle. Un mécanisme de coopération sera mis en place pour atténuer
les divergences de vues et faciliter les convergences économiques.
14. La définition de la future monnaie Éco-Cedeao se fera sur la base d’un panier de
devises représentatif des principaux flux commerciaux de la Zone, avec quatre
devises, l’euro, le dollar, le yuan et la livre sterling.
15. Le taux de change de la monnaie commune sera flexible mais administré par la
Banque centrale.
16. Un accord de taux de change sera conclu entre les parties pour l’ancrage de leur
monnaie existante à la monnaie Éco-Cedeao qui servira de pivot. Il sera adopté le
principe d’un corridor à l’intérieur duquel, autour de la monnaie pivot pourront
flotter les monnaies existantes avec une marge de fluctuations fixée surveillée
par l’autorité monétaire de la Cedeao.
17. À terme, sera envisagé le passage de la monnaie commune à la monnaie unique.
D. Sur les modalités de mise en œuvre
18. Une attention particulière sera accordée aux perspectives de la digitalisation
monétaire.
19. Pour enclencher la transition vers la monnaie commune, un premier pool d’États
réunissant les critères minimaux de convergence (qui devront être actualisés)
pourra se réunir. Par la suite seront recherchées de nouvelles adhésions au projet
en recherchant celles plus faciles à obtenir.
20. L’abandon de la garantie du Trésor français accordé aux États de l’UEMOA sera
décidé.
21. La confiance dans la monnaie Éco-Cedeao s’appuiera sur de nouveaux
mécanismes endogènes de sauvegarde et de crédibilité.
22. Lors de la phase de transition et d’apprentissage des mécanismes de change,
l’attention portera sur le rapprochement fiscal et budgétaire et la stimulation des
marchés financiers régionaux, deux conditions nécessaires.
23. Enfin, il est clairement admis que derrière les questions relatives aux choix sur la
manière d’opérer la création de la nouvelle monnaie, sur la future parité et son
adossement à un panier de devises, sur le niveau de flexibilité du taux de change
ou sur le « bon » régime d’allocation des devises qu’il faudra adopter, se cachent
d’autres questions cruciales, à savoir engager la transformation structurelle des
économies ouest-africaines.
24. Pour être porteuses de changements véritables, les propositions pour
accompagner le passage à l’Éco-Cédeao devront être solides au plan technique,
argumentées au plan économique, acceptées au plan politique et fondées sur des
mesures dont les impacts et les risques futurs seront préalablement évalués. La
question de la reconnaissance des avantages de l’intégration monétaire et de leur
partage pour susciter l’adhésion des populations est fondamentale pour la
réussite du projet.
Fait à Lomé, le 28 mai 2020, les états généraux de l’Eco
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Publié le lundi 31 mai 2021, par Gabinho